es testaments médiévaux établis par les rois de France et d’Angleterre ont été remarquablement préservés: entre 1182 et 1475, pas moins de trente-quatre testaments ou codicilles testamentaires nous sont parvenus, vingt-quatre français et dix anglais.2 Ces documents ne représentent que la portion congrue des décisions prises par les souverains dans la perspective de leur mort: ils se limitent avant tout à des dispositions pro remedio anime, même s’ils ne sont pas exempts de considérations politiques.3 La désignation d’héritiers, tant pour le trône que pour l’ensemble des possessions royales, et même, dans le cas anglais, les provisions financières nécessaires à l’exécution des legs, sont le plus souvent stipulés dans des actes distincts.4 Ceux-ci sont souvent émis conjointement aux testaments proprement dits mais, contrairement à eux, ils ne sont jala chancellerie royale face à la mort. une approche comparée des testaments des rois de france et d’angleterre (fin du xiie–finduxve s.)1 facing death at the royal chancery| la chancellerie royale face à la mort royal testaments; even if they deal with private bequests, testaments are considered as witnesses to the former kings’ memoria and therefore as involving the crown. 386 1 Je remercie pour leur aide Jean-François Moufflet aux Archives nationales et les archives d’Eton College et de Westminster Abbey. 2 Le déséquilibre apparent entre les deux royaumes est en large part dû au nombre de rois concernés: on compte en moyenne un testament et un codicille par souverain français, et un testament par monarque anglais. Voir la liste de ces textes en fin d’article. 3 Au-delà de la dimension politique de certains legs (voir par exemple Vale 2016, pp. 242– 243 et Rogge 2008, pp. 558–561 pour Henri V), des dispositions testamentaires touchent parfois à l’organisation du royaume. Ainsi CharlesVetCharlesVI enjoignent-ils de respecter l’ordonnance sur la minorité des rois. Voir aussi Hélary 2024, p. 316, pour le testament de Philippe III et Given-Wilson 2020, p. 7, pour celui de RichardII. 4 Le testament de Louis VIII, qui institue un héritier, constitue ici l’exception et non la norme (contraKasten 2005, pp. 169–170). Souverains français et anglais prolongent ainsi la dichotomie entre désignation d’héritier et distribution des biens meubles, qui se rencontre déjà chez les souverains carolingiens (ibid., p. 168 et pp. 172–173). En Angleterre, cette distinction est encore renforcée par lacommonlaw(Rogge 2008, p. 546) ; voir également Gillingham 2008, pp. 519–520. L À la mémoire d’Elizabeth “Peggy” A. R. Brown
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